LIGESCOURT - les V1

Ligescourt, petite commune au nord de la Somme, limitrophe avec le Pas de Calais, a abrité deux sites V1.

Du 13 juin 1944 au 29 mars 45 l'Allemagne lance sur Londres les V1 (Vergeltungswaffe eins, "arme de représailles n° 1"),
à partir de rampes de lancement entre la Seine et la Belgique. C'est le premier missile de croisière de l'histoire de l'aéronautique.
Son but, saper le moral des insulaires et ralentir la production industrielle.

C’est à Peenemünde, à 230 km de Berlin, sur les rives de la mer Baltique, qu’est conçu le V1, sous la direction de Wernher Von Braun.
23 décembre 1942, premier vol.
Bombardé par la R.A.F, 17 18 août 43590 bombardiers, 18 juillet 4 août 44413 B17, le centre de recherche subit de gros dégâts,
1600 tonnes de bombes. La production est transférée à Mittelwerk, complexe souterrain sous le mont Kohnstein près de Nordhausen
où 2000 V1 par mois sont montés par des prisonniers.
35000 V1 à 3500 Reichsmark et 280 heures chaque. 9000 lancés.

Pulsoréacteur au bruit caractéristique, charge explosive, kérosène, centrale assurant un guidage sommaire, petites ailes,
empennage stabilisateur, gouverne de lacet...
En raison du son distinctif, les Américains le surnommaient buzz-bomb, les Britanniques Doodlebug.
https://www.jean-maridor.org/son/v1.mp3
Catapulté à 250 km/h par un canon à vapeur sur une rampe de 40 mètres à 18°, une bougie allumait le moteur à réaction..
À une certaine altitude, il passait en vol de croisière, pilote automatique couplé au gyrocompas contrôlant altitude et vitesse.
Une petite hélice, reliée à un compte-tours, détermine la distance à parcourir.
Sur cible, le robinet d'essence est fermé, deux charges explosives baissent les gouvernes de profondeur, piqué du V1,
explosion par percuteur.

 

Poids 2200 kg environ (avec 830 kg de TNT et 680 litres de kérosène) - Vitesse 645 km/h - Portée 256-280 km
Altitude 800 1200 m - Précision 12 km
Bombes à fragmentation, tracts de propagande

Mars 1943, les Allemands débutent la construction d'une usine de montage de V2 à Eperlecques dans le Nord.
Main d’œuvre locale, STO.
29 juin, le comité de défense du cabinet de guerre anglais décide l'attaque de Peenemünde et d'Éperlecques
17 18 août bombardement de Peenemûnde, 27 août à août 44 25 bombardements du blockhaus d'Éperlecques.
Les Allemands poursuivent la construction à l’abri grâce à une carapace de béton de 5 m d'épaisseur soulevée par vérins hydrauliques
... et implantent 47 sites mobiles dans les bois ou parcs de châteaux à proximité de gares.
Novembre, la Royal Air Force prend des photos du site d’Yvrench, révèlant que Londres est une cible. Campagne de bombardement, 98 000 tonnes de bombes de décembre à juin 44, pour rien. Installations vides. Les Allemands font croire qu'ils réparent les sites
pour inciter les Alliés à gâcher le plus possible de bombes, épargnant d’autant l'Allemagne, et relativement tranquilles,
construisent les sites de 2e génération beaucoup plus discrets.
18 sites lourds, 47 légers dans la Somme, dont Crécy l’Hermitage & Caumartin, Machiel, Ligescourt Bois St-Saulve & route de Ponches,
Vironchaux ferme du Rossignol..
Des Flandres au Cotentin, les Allemands construisent des centaines de rampes dans les bois.
À Ligescourt, les travaux commencent en mars 43.
Main d’œuvre locale. Les sites, top secret, sont sécurisés par une cinquantaine de soldats allemands.
La base se compose d’une douzaine de bâtiments pour préparer et stocker le V1. Le gyrocompas est réglé dans un bâtiment amagnétique où les ailes sont montées.

Raids sur Ligescourt
    Septembre - Novembre 1943
Le ski-site, quasiment terminé par les Pioneer du 155 W Flak Regiment, régiment de défense antiaérienne chargé de réaliser
les bases de lancements, repéré par le Photographic Reconnaissance Unit le 15 novembre, jugé inquiétant par le comité Crossbow,
est bombardé le 5 Décembre.
Plus de 24 attaques jusqu'en avril 44. Le site ne sera jamais actif. Ligescourt est détruit à 80 %.
    5 décembre 1943 Site 698 sud-ouest du village
52 B26, piqué à 50°, 800 km/h, 2 bombes de 250 livres.
    21 décembre
    14 janvier 1944 Crash d’un B-17 touché par la DCA, forêt de Crécy. L'équipage saute en parachute.
    Février 44, des réseaux avertissent Londres que les Allemands réalisent des essais de V1, des Français font parvenir
une description détaillée.
    Vendredi 14 avril 1944 12h58 Mission Noball site 125 au nord du village
12 chasseurs bombardiers Spitfire IX de l'escadron 602, 12 du 453, australien, 12 chasseurs d'escorte du 132, arrivés par Berck-sur-Mer,
attaquent en formation, les 12 du 602 en premier. Pilote du 10e l'Aspirant Pierre Clostermann, jeune Français engagé volontaire
dans la R.A.F, qui terminera le conflit avec 33 victoires homologuées, et racontera son aventure dans 'le grand cirque'.
Bascule, plongeon, 22 bombes de 250 kg se décrochent en sifflant, pilotes à la limite de l'évanouissement...
soudain une énorme gerbe de feu, la flak, 9 canons de 88 mm 24 de 20 et 37, touche de plein fouet, d’un obus traçant de 37mm,
un Spitfire en piqué à 700 km/h, qui se désintègre et tombe sur la cible.
On en retrouvera les débris en 2010.
La majorité des bombes de l’escadron 602 tombe dans la région de l'objectif, mais le 453 largue trop court.
Le Pilot Officer australien Bob Yarra, Royal Australian Air Force, escadron 453, Service Number 413707, 21 ans, engagé à 18,
est inhumé par les allemands dans l'extension militaire britannique du cimetière d'Abbeville, parcelle 6 rangée H tombe 3.
Son frère, du même escadron, était tombé en Hollande, en décembre 1942.
    20-21 avril

Avant le début des tirs, un réseau de résistance en vole un V1, le démonte, l’envoie en Grande-Bretagne.
Le débarquement de Normandie oblige l’armée allemande à se replier vers le nord.
    13 juin 1944 4 h 18 1ère attaque V1 sur Londres
    25 juin 1944
323 appareils : 202 Halifax, 106 Lancasters, 15 Mosquitos attaquent 3 sites par temps clair. Raids précis,
2 Halifax perdus sur le site de Montorgueil, bombardement du site de Siracourt.
    Juillet
Un avion de la R.A.F réussit à se poser en Pologne, embarque un V1 intact fourni par la résistance polonaise.
Les tirs partent de 10 bases de lancement. 650 km/h 23 minutes.
    13 juin - 31 août, 8564 V1 lancés, 3564 atteignent Londres et son agglomération : 6184 tués, 17981 blessés,
750000 maisons détruites.
Les Britanniques développent des parades : DCA, barrages de ballons accrochés à des câbles, chasseurs. Certains pilotes,
à la même vitesse à coté, en touchant l'aile de la bombe avec la leur, déstabilisaient le V1 qui tombait en mer.
Les Allemands ont alors posé des charges explosives sur le bout des ailes, des couteaux sur le bord d'attaque
cisaillant les cordes des ballons.

 
Le contre-espionnage transmet les données exactes des bombes tombées trop court ou trop loin, et fausse les autres :
une grande partie tombera loin des agglomérations.
Du 13 juin au 31 août 44, sur 8564 V1 lancés, 3564 atteignent Londres et son agglomération : 6184 tués, 17981 blessés,
750.000 maisons détruites.